Société – Traque des mendiants et des ‘‘Wotrotigui’’ dans la ville d’Abidjan : De la nécessité d’agir et d’aller jusqu’au bout…
Société - Traque des mendiants et des ‘‘Wotrotigui’’ dans la ville d’Abidjan : De la nécessité d’agir et d’aller jusqu’au bout…
Cette décision, faut-il le souligner, n’est pas nouvelle. Déjà, en août 2013, le ministre de l’Intérieur d’alors, feu Hamed Bakayoko, avait signé un communiqué interdisant toute activité de mendicité aux carrefours et dans les rues de la capitale économique.
Réalité de la mendicité à Abidjan
Près de dix années après, la mendicité a encore pignon sur rue et se déroule de la plus belle des manières. Cette décision du District d’Abidjan remet donc au goût du jour, la problématique de la mendicité dans les pôles urbains. Il faut que ce soit clair :
Aucun gouvernement dans le monde ne peut prétendre venir à bout du phénomène de ceux qui font la manche dans les rues.
Aujourd’hui, on continue de rencontrer des nécessiteux dans de grandes capitales occidentales comme Paris, Bruxelles, Londres ou encore New York.
Mais contrairement aux capitales occidentales et à certaines grandes villes africaines, la mendicité, telle qu’elle se pratique ici en Côte d’Ivoire et singulièrement dans la ville d’Abidjan, pose un problème de salubrité publique. Il ne faut pas avoir peur des mots.
C’est en cela qu’il faut saluer cette initiative du District d’Abidjan. Cependant, une question mérite d’être posée :
A-t-on chercher à connaître les raisons de l’échec de l’opération de 2013 avant de lancer la présente traque aux mendiants qui, cette fois-ci, s’étend aux ‘‘Wotrotigui’’ ?
Dans un cas comme dans l’autre, c’est une impérieuse nécessité et il est temps d’agir pour canaliser ce phénomène qui devient inquiétant avec surtout le djihadisme qui frappe à nos portes.
Il ne sert à rien de construire les plus beaux ponts et les plus beaux édifices et puis laisser les mendiants coloniser et infester le paysage urbain.
D’aucuns diraient que les mendiants sont des êtres humains qui fuient l’extrême pauvreté dans leur pays. Et comme l’a dit Félix Houphouët-Boigny, la Côte d’Ivoire ne saurait être un ilot de prospérité dans un océan de misère. Soit.
Mais aujourd’hui, les paradigmes de la gestion des problématiques sociales ont beaucoup évolué. Même en France, les autorités ont dû prendre des mesures énergiques, pas pour interdire la France aux autres citoyens du monde, mais pour contrôler les flux migratoires.
L’on a encore en tête, cette célèbre phrase de l’ancien Premier ministre Michel Rocard qui disait que « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ».
C’est assez cru comme position, mais c’est une vérité irréfragable.
Aujourd’hui, il se trouve que la Côte d’Ivoire est devenue une sorte d’eldorado pour les ressortissants de beaucoup de pays de la sous-région.
Mais la Côte d’Ivoire ne peut pas absorber tous les flux de nécessiteux qui fuient la misère de leurs pays.
Mieux, la mendicité, telle qu’elle se pratique dans nos rues n’est plus seulement l’apanage de personnes pauvres, défavorisées ou handicapées.
Dans bien des cas, c’est un cartel qui se cache derrière ces enfants, ces estropiés et ces aveugles qui font la manche dans nos rues, aux feux tricolores et aux carrefours des grandes artères de la ville d’Abidjan.
Dans la plupart des cas, ce sont des ressortissants de pays de la sous-région qui sont convoyés en Côte d’Ivoire par des individus véreux qui s’adonnent à la traite des hommes.
Combien de cars bourrés d’enfants à bas âge et de handicapés n’ont-ils pas été interceptés par nos forces de l’ordre, généralement aux frontières Nord et Est du pays ?
Il est évident que des individus qui vont se réclamer défenseurs des droits de l’homme et des adeptes de la politique politicienne vont pérorer autour de cette opération, mais Cissé Bacongo doit aller jusqu’au bout.
La Côte d’Ivoire est certes, le pays de l’hospitalité, mais le pays se saurait devenir, si ce n’est déjà, la vache à lait de trafiquants véreux pour qui la mendicité en terre ivoirienne est une opportunité de mobilisation de ressources extérieures pour se réaliser au pays.
Démanteler les cartels qui exploitent la fragilité et la vulnérabilité de personnes défavorisées par la nature…
Après l’échec de 2013, si l’on échoue encore à canaliser le phénomène de la mendicité dans les rues en 2024, ne soyons pas étonnés demain, de voir les mendiants déambuler librement dans les ascenseurs des tours de la cité administrative du Plateau dans l’exercice de leur métier.
Ici encore, il faut que les choses soient claires : L’on ne demande pas d’embastiller les mendiants ou de les parquer comme des bêtes de somme.
L’on demande seulement de canaliser le phénomène et surtout de démanteler les cartels qui exploitent la fragilité et la vulnérabilité de personnes défavorisées par la nature.
Stratégie pour éradiquer la mendicité à Abidjan
L’objectif consistera à mettre le grappin sur les mendiants qui opèrent pour le compte de réseaux mafieux, les rassembler et les rapatrier dans leurs pays d’origine.
Et la Côte d’Ivoire ne sera pas le premier pays à engager cette traque suivie de rapatriement de mendiants.
En décembre 2019, le Bénin a lancé l’opération “zéro mendiant et zéro malade mental” dans les rues de Cotonou.
Dans le cadre de cette opération, 128 mendiants, dont des femmes et des enfants, ont été rapatriés vers leurs pays d’origine, notamment le Niger et le Nigeria.
En mars 2022, le Sénégal en a fait autant. 1107 mendiants nigériens avaient été rapatriés dans leur pays via un vol spécial.
En juin 2022, ce fut le tour du Ghana d’arrêter et de rapatrier 914 mendiants dont 356 mineurs qui étaient parrainés par 202 adultes.
Fait grave, Laouan Magagi, ministre nigérien de l’action humanitaire et de gestion des catastrophes avait révélé lors de cette opération, que certains trafiquants « prennent des enfants en location et paient les parents pour aller mendier dans d’autres pays ».
Voilà donc qui est clair. Pour réussir cette opération du District d’Abidjan, la Côte d’Ivoire pourrait emboîter le pas aux pays frères de la sous-région.
Arrêter, rassembler et rapatrier les mendiants qui ‘‘travaillent’’ pour des cartels.
C’est à ce seul prix qu’on pourra faire baisser le nombre de mendiants dans nos rues.
Si on ne le fait pas, on se retrouvera encore dans quelques années devant le même phénomène avec un nombre croissant de mendiants et l’opération sera plus difficile à conduire et à gérer.
Le timing du District d’Abidjan est bon, il est donc temps d’agir et cette fois-ci, pour de bon après le flop de 2013.
Kra Bernard
NCI News | Rues d’Abidjan : les mendiants, et vendeurs ambulants interdits